Hello la tribu !
J’espère que vous allez bien alors que l’été a (enfin) décidé de pointer le bout de son nez.☀️🕶️
Fraîchement revenu de deux semaines de randonnées en Autriche et en Suisse, je suis trop content de vous retrouver sur ce format auquel j’ai offert un petit relooking. J’espère qu’il vous plaira ! Je suis très preneur de vos retours à ce sujet.
Dans cette 5° édition, on va explorer un principe qui en, tant que nordiste, m’est particulièrement cher, l’art de l’accueil. C’est une étape tellement cruciale pour une communauté, mais parfois tellement négligée. Alors partons découvrir ce principe avec le Refuge Solidaire qui accueille chaque année des centaines de personnes en situation d’exil.
Bonne lecture !
⌚ Temps de lecture : 12 minutes
🗺️ LES ÉTAPES DE NOTRE EXPLORATION
Lorsque l’on anime une communauté, l’accueil est un moment charnière pour la suite de l’expérience collective que vous offrez. Loin d’être anodin, cette première rencontre peut créer les bases d’une relation saine et durable. Mais elle peut aussi tout gâcher ….
Les 3 piliers d’un accueil réussi :
La sécurité : Poser un cadre clair et rassurant afin que vos membres se sentent à l’abri du danger.
La confiance : Créer des premiers liens avec et entre vos membres pour faire naître les bases d’une relation de confiance réciproque.
La légitimité : Prendre un rôle dans une communauté est le meilleur moyen d’y trouver sa place.
4 conseils pratiques pour votre communauté :
Prendre ses membres par la main.
Révéler votre communauté en la cartographiant.
Créer des premiers liens.
Marquer le coup.
On y va ? 😉
REFAIRE TRIBU
Pour celles et ceux qui nous ont rejoints, je m’appelle Hugo et je suis un explorateur des communautés.
En 2023, je me suis immergé dans une dizaine de communautés en Europe pour explorer l’art de faire communauté : école dans la forêt, monastère, peuple autochtone, réseau de jeunes engagés, …
De ces immersions, j’ai analysé 10 principes essentiels pour animer un collectif. Ces principes sont les conseils que j’aurais aimé avoir avant de devenir responsable de communauté.
Vous pouvez retrouver les précédentes éditions ici :
Principe 1 : Remplir une mission pour tendre vers une vision
Principe 4 : Définir ses frontières pour construire des ponts.
Et pour ne pas louper les prochaines, vous pouvez vous abonner :
📃 PRINCIPE 5 : SOIGNER L’ACCUEIL
L’accueil représente pour moi la quintessence d’une communauté.
C’est un échantillon brut de l’aventure collective qu’elle nous propose.
Au fur et à mesure de mes immersions dans les communautés, j’ai mesuré l’importance de ces premiers instants.
J’ai compris qu’un bon accueil pouvait sublimer l’expérience collective que j’allais vivre.
Et qu’au contraire, un mauvais accueil pouvait tout gâcher….
Et je pense que l’on peut toutes et tous mesurer cette différence.
Que ce soit votre arrivée dans un nouveau quartier, une nouvelle école ou un nouveau travail, prenez le temps de vous souvenir de l’accueil que vous avez reçu et mesurez l’impact qu’il a eu sur votre intégration.
Sans être mentaliste, je suis prêt à parier avec vous qu’il y a une corrélation directe entre votre accueil et votre adaptation dans ce collectif.
Mais pourquoi l’accueil est-il si important ?
✨ FAIRE BONNE IMPRESSION
Je sais qu’on vous l’a certainement déjà dit, mais c’est tellement important que je le réécris ici : ce sont les premiers moments d'une expérience qui en déterminent souvent l'issue.
Vous savez, ces premières notes d’une musique qui nous entraînent sur la piste de danse. Ces premières bouchées qui nous invitent à déguster toutes les saveurs d’un plat.
Ces premiers regards qui nous lient à une autre personne.
Ces premiers instants, bien que subtils et éphémères, donnent le ton d’une expérience. Une première impression qui nous donnera envie de continuer l’aventure ou au contraire de passer notre chemin.
Et bien, lorsque vous accueillez une personne dans votre communauté, c’est cette première impression qui se joue.
Et comme on ne peut faire qu’une seule fois une 1° impression, alors autant qu’elle soit bonne !
🤝 POSER LES BASES D’UNE RELATION
Pour autant, l’accueil dans une communauté va bien au-delà de ce côté expérientiel.
Car être dans un collectif n’est pas qu’une expérience que l’on vit, c’est une relation que l’on noue.
Ce n’est donc pas qu’un simple accueil qui se joue ici, mais une 1° rencontre.
Une rencontre entre une personne et un collectif.
Mais surtout, une rencontre entre cette personne et les membres de ce collectif.
Et comme lorsque l’on part pour un premier rendez-vous, cette rencontre avec la communauté s’accompagne souvent de son petit lot de doutes et d’incertitudes :
Et si le groupe ne m’acceptait pas ?
Et si je n’étais pas assez bien pour eux ?
Et si je ne me sentais pas à ma place ?
Et si ….
Ces doutes sont humains. Nous sommes des êtres sociaux, notre survie a longtemps tenu à notre capacité à vivre dans un groupe et à savoir y rester.
Cela a créé en nous, un besoin d’appartenance sociale extrêmement fort.
Un besoin qui nous pousse viscéralement à rejoindre des collectifs.
Mais un besoin qui nous retient parfois aussi de le faire, par peur de se faire rejeter.
Alors, lorsque vous animez une communauté, votre rôle est de sécuriser ce premier pas pour vos nouveaux membres.
Leur montrer que c’est possible. Que vous êtes là pour eux si besoin.
Et surtout, votre rôle est de leur donner envie de continuer à faire d’autres pas avec vous.
Bon d’accord, mais ça veut dire quoi un bon accueil ?
Vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais accueil …
Non, je rigole, je ne partirai pas sur une tirade philosophique.
Car même si l’accueil doit être à l’image de chaque communauté, il existe pour moi 3 piliers indispensables qui permettront à vos membres de s’intégrer et de coopérer.
J’ai nommé :
La sécurité
La confiance
La légitimité
Ces 3 piliers sont inspirés des recherches de 2 biologistes, Gauthier Chapelle et Pablo Servigne, qui ont analysé les conditions de coopération dans le monde vivant qu’ils partagent dans leur livre L’Entraide, l’autre loi de la jungle (c’est une véritable mine d’or).
Pour les comprendre, immergeons-nous au sein du Refuge Solidaire en s’inspirant de leur art de l’accueil.
Allez, c’est partiiiiii !
🤿 L’IMMERSION AU REFUGE SOLIDAIRE
Situé à Briançon à la frontière entre la France et l’Italie, le Refuge Solidaire s’occupe de l’accueil d’urgence des exilés.
Dans ce lieu, ce sont des centaines de personnes et des dizaines de nationalités qui se mélangent chaque jour pour obtenir un peu de répit dans leurs parcours. À la recherche d’un endroit pour se reposer et reprendre des forces, ils viennent trouver refuge dans cette ancienne caserne de CRS bien souvent en surcapacité d’accueil.
Malgré les urgences qu’impose ce type de lieu (préparation des repas, logistique, gestion des tensions, etc…), j’ai rarement vu autant d’attention portée à cette première rencontre. Qu’importe l’heure à laquelle vous arrivez, il y a toujours quelqu’un pour vous accueillir. Non pas un post-it qui vous indique un lit, ou une pancarte qui vous demande d’attendre dehors, mais bel et bien une personne en chair et en os.
Et je peux vous dire que cela fait toute la différence !
Car comme une bénévole me le dira là-bas : “Il est plus facile d’ouvrir une nouvelle porte, lorsque l’on sait qu’une personne nous attend derrière”.
Même si cet accueil est bien sûr d’une tout autre dimension pour des personnes exilées venant de parcourir de nombreux kilomètres, je pense que chaque communauté peut s’inspirer de cet art de l’accueil reposant sur les 3 piliers : sécurité, confiance et légitimité.
La sécurité
La sécurité, c’est la base de l’accueil !
C’est comme la pâte d’une pizza, la crème d’un tiramisu ou le riz d’un risotto.
Bref, vous m’avez compris, c’est I-N-D-I-S-P-E-N-S-A-B-L-E.
Lorsque l’on intègre un collectif, c’est comme lorsque nous entrons dans un nouvel environnement, nous avons besoin de savoir que nous sommes à l’abri du danger. Qu’il ne pourra rien nous arriver ici.
Comme le montre la fameuse pyramide de Maslow, ce n’est que lorsque ce besoin est rempli que nous sommes disposés à créer du lien.
Physiologiquement, lorsque nous nous sentons en sécurité, notre attention passe du mode A “Quels sont les dangers auxquels je dois me défendre ?” au mode B “ Quelles sont les personnes avec qui je peux me connecter ? “
On passe d’une posture de fermeture sur soi à une posture d’ouverture à l’autre.
Ce sentiment de sécurité est donc indispensable à la création de lien.
Et cela, le Refuge solidaire l’a bien compris.
Lorsqu’une personne rentre au sein du Refuge, tout est mis en place afin qu’elle se sente en sécurité. Les règles communes sont expliquées longuement et chaque personne s’engage à les respecter.
Cela permet à chaque migrant de savoir ce qu’il est possible de faire au sein du Refuge et ce qui est interdit, tout en comprenant POURQUOI.
Et c’est pour moi la clé de cet espace de sécurité : l’adhésion de vos membres.
Il faut que cette adhésion soit entière et consciente.
Car la motivation à suivre une règle supplantera toujours la peur d’être sanctionné si on l’enfreint.
C’est pourquoi, ce cadre de sécurité repose avant tout sur la manière dont il est présenté.
Plus vous offrirez à vos membres la possibilité de s’approprier ce cadre, plus ils pourront y adhérer.
Et plus ils y adhéreront, plus ils se sentiront responsables de sa mise en place.
Ils deviendront acteurs de cadre et pourront ainsi vous aider à le faire évoluer en fonction des besoins du groupe.
La confiance
La confiance est au cœur de toutes les relations que j’ai vécues au sein du Refuge Solidaire. Et je dirai même, plus globalement, au sein de toutes les communautés dignes de ce nom.
Car sans confiance, il ne peut y avoir de coopération.
Avoir confiance en un groupe, c’est sentir que l’on peut se fier à ses membres. C’est parce qu’on les croit et que l’on peut compter sur eux, que l’on ose coopérer.
Cette relation de confiance est donc le ciment de chaque communauté. Un ciment qui prend forme dès les premiers moments avec le collectif.
Alors, comment créer une relation de confiance pendant l’accueil ?
2 ingrédients m’ont particulièrement marqué au Refuge Solidaire.
👂 L’ÉCOUTE
À l’entrée au refuge, chaque personne est accueillie dans un bureau pour lui présenter la communauté, répondre à ses questions et surtout prendre le temps de l’écouter.
Car ici, ce n’est pas qu’un migrant qui est accueilli, mais une histoire, un parcours de vie, une personnalité.
Bref, un être entier et complexe que l’on apprend à connaître.
Le psychiatre français Christophe André nous dit même que “écouter c'est permettre à l'autre d'exister”.
Et bien, en offrant cet espace d’écoute, le Refuge Solidaire fait exister ses membres au sein de sa communauté, sa place y est reconnu.
👐 LES RELATIONS INTERPERSONNELLES
Lors de cet accueil dans le bureau, c’est avant tout une rencontre humaine entre deux individus qui se crée. Une rencontre qui fera naître des premiers liens de confiance qui viendront ensuite se propager à l’ensemble de la communauté.
C’est le propre de la confiance. Elle est à la fois :
Intime : il est plus facile de créer de la confiance avec quelques personnes plutôt qu’avec un groupe entier.
Contagieuse : Si vous avez tissé une relation de confiance avec une personne de la communauté, vous ferez plus facilement confiance à un inconnu appartenant à la même communauté qu’à un inconnu n’en faisant pas partie. Vous vous direz que si cette personne est dans cette même communauté, elle doit certainement partager les mêmes valeurs et vous pouvez donc lui faire confiance.
Ainsi, pour créer de la confiance dans la communauté, je vous suggère de créer d’abord de la confiance entre des premiers membres. Cette confiance se propagera ensuite à des autres membres avant d’atteindre la structure même de la communauté.
La légitimité
Se sentir légitime, c’est savoir que l’on a le consentement du groupe.
Autrement dit, c’est lorsque je me sens à ma place. Et surtout que je sens que les autres acceptent la place à laquelle je suis.
C’est un autre élément indispensable à la coopération, car il donne le pouvoir d’agir.
Ce n’est que lorsque vos membres se sentiront légitimes qu’ils contribueront à votre communauté et qu’ils en deviendront ainsi des véritables acteurs.
C’est la clé de l’engagement d’une communauté. Ne pas seulement proposer la capacité d’agir, mais donner le POUVOIR d’agir.
C’est pourquoi le Refuge Solidaire insiste pour que les migrants qu’ils accueillent puissent participer à la vie de la communauté s’ils le veulent. On leur donne la possibilité de contribuer au repas, à l’entretien du lieu, et même à l’organisation d’événement.
Leur rôle est clairement défini avec des droits et des responsabilités. Ce qui leur permet d’agir sans prendre le risque d’être jugé ou réprimandé pour ce qu’ils entreprennent, car leur champ d’action est compris par tous.
Prendre un rôle dans une communauté est le meilleur moyen d’y trouver sa place.
💡 4 CONSEILS POUR UN ACCUEIL RÉUSSI
Maintenant que vous avez ces 3 piliers en tête, j’aimerais vous partager quelques conseils que l’on m’a donnés au fur et à mesure de mes immersions.
J’espère que ces conseils vous seront autant utiles qu’ils l’ont été pour moi.
Car la théorie c’est bien, mais l’accueil c’est avant tout de la pratique !
Alors bien sûr, il existe de multiples manières de nourrir ces 3 piliers. Encore une fois, l’important est que cet accueil vous ressemble, qu’il soit à l’image de votre communauté.
On y va ?
1️⃣ PRENDRE SES MEMBRES PAR LA MAIN
L’accueil gagne toujours à être fait entre des individus, des humains en chair et en os.
En fonction de l’échelle de votre communauté, vous pouvez mettre en place :
Un appel en 1-to-1 pour accueillir la personne.
Des entrées sous forme de cohorte pour créer un esprit de promotion.
Un binôme “nouveau - ancien membre” à l’entrée de la communauté pour faciliter l’intégration.
2️⃣ RÉVÉLER SA COMMUNAUTÉ EN LA CARTOGRAPHIANT
Savoir précisément qui est dans votre communauté et ce que vous faites permettra à vos nouveaux membres de naviguer plus facilement à l’intérieur.
Vous pouvez pour cela réaliser (liste non-exhaustive) :
Un kit de bienvenue pour accompagner l’entrée dans la communauté étape par étape.
Un annuaire pour comprendre qui sont les membres et quels sont leurs rôles.
Une charte de valeur pour partager l’essence de votre communauté.
Les règles de fonctionnement pour afficher ce qui est permis et ce qui ne l’est pas.
Un extranet qui rassemble toutes les informations clé de votre communauté (son histoire, les personnes ressources, les projets menés, etc…)
Un conseil : choisissez le ton et le format qui vous ressemble !
3️⃣ CRÉER DES PREMIERS LIENS AU SEIN DE LA COMMUNAUTÉ
On l’a vu, la confiance est intime et contagieuse. Pour cela, offrez de l’espace à vos nouveaux membres pour créer des premiers liens :
Une présentation des nouveaux membres via vos canaux de communication ou lors d’un événement.
Des rencontres thématiques organisées pour les membres (en fonction de la géographie, du rôle que l’on veut avoir dans la communauté, etc…)
Des mises en relation personnalisées entre vos membres pour créer des liens privilégiés.
4️⃣ MARQUER LE COUP
Comme toute la relation, le premier rendez-vous est toujours cruciale. Faites de cette rencontre un moment marquant et symbolique :
Une photo pour immortaliser l’entrée dans la communauté.
Un objet symbolique donné à l’arrivée (un diplôme, un bracelet, …).
Netflix offre par exemple une couverture à ses employés. Bien plus qu’un simple bout de tissu, c’est tout l’univers de l’entreprise qui est transmis dans cette couverture afin de renforcer le sentiment d’appartenance.
C’est la fin de cette 5° édition sous ce tout nouveau format.
Je vous remercie de m’avoir lu ! 🙏
Je suis très preneur de vos retours par mail ou en commentaire du post.
Et puis, si le cœur vous en dit, vous pouvez partager cette newsletter autour de vous. Cela me serait d’un incroyable soutien.
On se retrouve dans 2 semaines pour une édition sur les coulisses de Refaire Tribu.
D’ici là, prenez soin de vous ! 😉
Hugo
Merci pour cette édition très complète !
Merci pour cette exploration vraiment intéressante sur les différentes dimensions de la communauté. Je m’autorise une correction concernant Christophe André. Il n’est pas psychanalyste mais psychiatre. Je pense même qu’il émet une certaine réserve vis à vis de la psychanalyse. 😉